Une circulaire du 9 octobre 2023 émanant du ministère de la Justice vient préciser les orientations de politique pénale en matière de justice pénale environnementale et invite les parquets à une répression accrue des infractions portant atteinte à l'environnement. Le CNB apporte quelques précisions sur le rôle des avocats dans ce cadre.
La circulaire du 9 octobre 2023 de politique pénale en matière de justice pénale environnementale fait suite à :
- la loi du 24 décembre 2020 créant notamment les pôles régionaux environnementaux,
- la circulaire du 11 mai 2021 visant à consolider le rôle de la justice en matière environnementale,
- la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique,
- le décret du 13 septembre 2023 créant les comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale (COLDEN).
Pour rappel, les pôles régionaux environnementaux, désignés par le décret du 16 mars 2021, sont compétents pour connaître de l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions environnementales « dans les affaires qui sont ou apparaîtraient complexes, en raison notamment de leur technicité, de l'importance du préjudice ou du ressort géographique sur lequel elles s'étendent » (art. 706-2-3 du code de procédure pénale).
Outre l'articulation entre les services judiciaires et administratifs, la circulaire du 9 octobre 2023 invite à un renforcement de l'efficacité des enquêtes judiciaires et à la mise en oeuvre d'une politique pénale ferme et adaptée.
À ce titre, elle encourage le recours à l'article 28 du code de procédure pénale autorisant les fonctionnaires et agents d'administrations spécialisées d'exercer certains pouvoirs de police judiciaire dans les conditions et limites fixées par les lois spéciales leur reconnaissant un tel pouvoir. Les co-saisines telle que « Douane - Office français de la biodiversité (OFB) - Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement du territoire et du logement (DREAL) » sont ainsi encouragées. Ces agents peuvent contribuer à la réalisation d'acte de police judiciaire, comme la garde-à-vue, dans la limite des compétences reconnues par des lois spéciales. Dans ce cadre, les avocats devront s'assurer de l'existence et du contenu de ces lois spéciales. En particulier, le respect des compétences telles que prévues par l'article L172-1 et suivants du code de l'environnement au bénéfice des « inspecteurs de l'environnement » de l'OFB devra être vérifié et une nullité pourra, au besoin, être soulevée dans l'hypothèse d'une violation des articles précités.
La circulaire encourage également les parquets à convoquer les techniques spéciales d'enquête du code de procédure pénale portant sur la délinquance organisés. Les avocats devront s'assurer que l'infraction en cause peut être poursuivie selon les règles spéciales relatives à la délinquance organisée et qu'elle entre dans la liste des infractions prévue par les articles 706-73 et suivants du code de procédure pénale. À titre d'exemple, le délit de déversement d'eaux usées non domestiques dans le réseau public (art.L1337-2 du code de l'environnement) ne peut pas être poursuivi selon ces techniques spéciales même s'il est commis en bande organisée.
La circulaire appelle par ailleurs à la mise en oeuvre d'une répression ferme et adaptée grâce au recours à la convention judiciaire d'intérêt public environnementale (CJIPE) dont les critères d'opportunité sont précisés :
- la CJIPE est adaptée aux faits de toute nature, peu important leur complexité ou leur ampleur ;
- le comportement du mis en cause (révélation spontanée des faits, coopération en vue de la régularisation) et sa personnalité (antécédents judiciaires) sont des éléments à prendre en compte dans l'appréciation de recourir ou non à une CJIPE.
Au regard de ces critères, les avocats pourront conseiller leur client souhaitant recourir à une CJIPE, étant précisé qu'il est toujours possible de la refuser. Il convient également de rappeler qu'une amende jusqu'à 30% du chiffre d'affaires moyen des trois dernières année à la date du CJIPE peut être prononcée (art. 41-1-3 du code de procédure pénale). Pour plus d'information sur la CJIPE, retrouvez le colloque organisée par le CNB sur la justice négociée, les 20 et 21 avril 2023.
La circulaire précise que les victimes, en particulier les associations, devront être tenues informées de ces procédures afin de leur permettre de solliciter une indemnisation. Les avocats intervenant régulièrement auprès de ces associations peuvent utilement rappeler aux parquets les contacts de leurs clientes.
Enfin, la circulaires encourage les parquets à retenir un large champ infractionnel afin de pouvoir requérir des peines complémentaires telles que la confiscation générale du patrimoine en matière de blanchiment. Les avocats devront s'assurer que les peines complémentaires requises sont effectivement prévues pour les délits objets de la prévention.