10 février 2025

Mission d'urgence sur l'audiencement criminel : le CNB alerte sur les risques des réformes envisagées

Libertés et droits de l'homme

Fin 2024, le ministre de la Justice a lancé trois missions d'urgence : l'audiencement criminel et correctionnel, l'exécution des peines et la déjudiciarisation. La mission sur l’audiencement criminel constate des difficultés croissantes liées à l’augmentation des procédures. Elle propose des réformes pour améliorer l'architecture judiciaire et les délais d’audiences.

Le CNB a été auditionné le 7 janvier dernier et a rappelé que la profession d’avocat est un maillon essentiel de la chaîne pénale. 

Si le CNB reconnait que les insatisfactions des justiciables s’agissant de la lenteur des procédures sont réelles a rappelé que les politiques publiques ne doivent pas reposer sur le ressenti de l’opinion publique mais sur des réalités et des chiffres établis. 

Dès lors le CNB a rappelé l’importance de veiller à ne pas adapter la procédure et les droits des justiciables aux moyens que le gouvernement veut bien allouer à la Justice mais au contraire que les moyens doivent s’adapter aux droits afin de permettre leur effectivité.  

Le CNB a rappelé ses réserves sur les cours criminelles départementales (CCD) qui représentent un danger pour la démocratie judiciaire et l’oralité des débats. Le CNB a également souligné sa vive opposition à l’introduction d’une CRPC en matière criminelle et portant sur des enjeux d’une extraordinaire gravité en matière de liberté pour le condamné. 

Le CNB s’est prononcé favorablement à l’ensemble des propositions qui permettent d’organiser en amont le déroulé des audiences et leur fixation, sous réserve du respect des droits des justiciables, des droits de la défense et des échanges indispensables entre les acteurs judiciaires.

A ce titre, il apparait que la profession pourrait soutenir : 

  • la généralisation des dates d’audiences fixées dans l’ORTC en concertation avec les avocats ;
  • la fixation des dates d’audience en concertation avec les avocats aux audiences relais ou de fixation ;
  • le fait d’assurer les extractions judiciaires ordonnées ; 
  • améliorer la sensibilisation du public sur l’aide juridictionnelle, par exemple par la remise de mode d’emploi dans les convocations.

S’agissant de la possibilité d’uniformiser les demandes de mise en liberté par la mise à disposition d’un document Cerfa pour le détenu, le CNB comprend l’intérêt de cette modalité de saisine, en termes d’accès au droit et à la justice, notamment pour les publics les plus fragiles, mais s’oppose à ce qu’un tel document soit une condition de recevabilité de la demande.

S’agissant d’un éventuel allongement des délais de détention provisoire le CNB a rappelé sa ferme opposition compte tenu du fait que la détention provisoire est une mesure grave qui consiste à incarcérer une personne encore présumée innocente.

S’agissant des renvois, l’ensemble des maillons de la chaîne pénale subit des difficultés dans le fonctionnement de la juridiction, l’organisation de la politique pénale, ou la gestion d’un cabinet. Il serait opportun d’entamer une réflexion en partant du constat d’une responsabilité partagée de tous les acteurs de la chaînes pénales.

A cet égard, la présence d’un avocat au sein des commissions de coaudiencement permettrait d’entamer une démarche interprofessionnelle intéressante concernant les questions de calibrage des audiences et des renvois.

La question des renvois devrait à cet égard faire l’objet d’une réflexion plus large, impliquant également les modes de citation ou encore la possibilité pour les avocats d’effectuer des reproductions numériques des dossiers pénaux.