Le Conseil constitutionnel censure comme contraires au principe d'égalité devant la justice des dispositions législatives excluant du bénéfice de l'aide juridictionnelle, hors cas particuliers, les étrangers qui ne résident pas régulièrement en France.
Le Conseil constitutionnel avait été saisi de la question de savoir si les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, en ce qu'elles excluent par principe les salariés étrangers en situation irrégulière du bénéfice de l'aide juridictionnelle, portent atteinte aux doits et libertés que la Constitution garantit.
Les litiges au principal concernaient des salariés étrangers en situation irrégulière, employés dans le cadre d'un CDD ou contrat temporaire et qui en sollicitaient la requalification en CDI devant le CPH. Leur demande d'aide juridictionnelle avait été déclarée caduque faute d'avoir produit un titre de séjour en cours de validité.
Le Conseil constitutionnel rappelle que si le législateur peut prendre des dispositions spécifiques à l'égard des étrangers, en tenant compte notamment de la régularité de leur séjour, c'est à condition de respecter les droits et libertés garantis par la Constitution reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République et, en particulier, pour se confirmer au principe d'égalité devant la justice, d'assurer des garanties égales à tous les justiciables.
Le Conseil constitutionnel relève toute que, dans la mesure où les étrangers ne résidant pas régulièrement en France peuvent bénéficier, par dérogation, de l'aide juridictionnelle :
- lorsqu'ils sont mineurs, ou
- lorsqu'ils sont mis en cause ou parties civiles dans une procédure pénale, ou
- lorsqu'ils font l'objet de certaines mesures prévues par 'article 515-9 du Code civil ou par le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asil (CESEDA), ou
- à titre exceptionnel, lorsque leur situation apparaît particulièrement digne d'intérêt au regard de l'objet du litige ou des charges prévisibles du procès.
Le Conseil constitutionnel en conclut que les dispositions qui privent, dans tous les autres cas, les étrangers ne résidant pas régulièrement en France du bénéfice de l'aide juridictionnelle pour faire valoir en justice les droits que la loi leur reconnaît, sont contraires à la Constitution en ce qu'elles n'assurent pas à ces derniers des garanties égales à celles dont disposent les autres justiciables.
Relevant qu'aucun motif ne justifie de reporter les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité, le Conseil constitutionnel juge que celle-ci intervient à compter de la date de publication de sa décision et est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.