Le Conseil national des barreaux a toujours manifesté son intention de prendre un rôle actif sur le sujet de la réutilisation de la donnée judiciaire, en demandant notamment la création d’une instance publique chargée de la régulation et du contrôle des algorithmes utilisés pour l’exploitation de la base de données des décisions de justice ainsi que de leur réutilisation, dont doivent, notamment, être membres la Cour de cassation, le Conseil d’Etat et le Conseil national des barreaux.
Après avoir constaté la nécessité de déterminer le fonctionnement technique et éthique de chacune des technologies portées par les Legaltechs du domaine de la « Justice prédictive » ainsi que leur utilité pratique pour les professionnels du droit, l’assemblée générale du Conseil national des barreaux (CNB), réunie les 5 et 6 juillet 2019, a donné mandat au groupe de travail Legaltech de piloter une étude comparative.
L’étude, conduite en cinq phases, a été pilotée par le Groupe de travail Legaltech, composé de membres élus du CNB et mise en œuvre par Sopra Steria Next dont l’équipe était composée à part égale d’experts des projets de transformation numérique dans le monde judiciaire et d’experts en data science.
Sur la base des conclusions issues de cette étude, des travaux d’ores et déjà initiés par le CNB et de l’expertise de ses membres le groupe de travail Legaltech a établi les 14 préconisations d’actions suivantes :
1. Promouvoir l’usage exclusif de la notion de jurimétrie dans les communications, publications ou lors des événements organisés par le CNB sur le sujet ;
2. Proposer un kit de formations visant à améliorer la compréhension des technologies et des résultats qu’elles fournissent ;
3. Créer un club utilisateurs au sein du CNB afin de partager les bonnes pratiques, formaliser des retours d’expériences et faire valoir les ajustements ou évolutions requis ;
4. Créer un groupe de travail en lien avec la Commission des règles et usages afin de mener des réflexions sur l’application de nos règles déontologiques dans le cadre du recours à l’intelligence artificielle ;
5. Promouvoir une offre de jurimétrie qui réponde aux attentes des avocats français et à des principes éthiques fondamentaux ;
6. Penser des stratégies de mutualisation d’acquisition des outils par l’intermédiaire des instances représentatives de la profession ;
7. Faire conduire par l’Observatoire de la profession d'avocat en lien avec le CREA une étude portant sur les impacts des outils de jurimétrie au sein des différentes branches du droit et mener une réflexion sur ces sujets ;
8. Ouvrir une réflexion sur la notion de consultation juridique à la lumière de l’utilisation des outils de jurimétrie ;
9. Promouvoir une Charte sur la transparence et l’éthique de l’utilisation de la donnée judicaire ;
10. Promouvoir une politique progressive d'open data judiciaire qui pourrait notamment s'appliquer ressort par ressort ;
11. Développer en commun avec les instances compétentes une approche spécifique de la question de l’accessibilité, de l’auditabilité et du contrôle des algorithmes ;
12. Elaborer une stratégie de large intégration du numérique dans les activités des professionnels du droit et de la justice ;
13. Prendre part aux expérimentations menées sur la jurimétrie par les diverses parties prenantes ;
14. Etendre aux formations initiales en faculté de droit la politique de mise à niveau en matière d’usage et de conception d’outils numériques.
Les travaux réalisés ont ainsi permis de rappeler l’importance de réguler les nouveaux outils de jurimétrie et d’assurer le respect de principes éthiques dans le cadre de la réutilisation de la donnée de justice.
En conséquence, une Charte sur la transparence et l’éthique de l’utilisation des données judiciaires annexée au rapport a été adoptée pour garantir l’autorégulation des acteurs tant s’agissant des algorithmes utilisés pour l’exploitation de la base de données des décisions de justice que de la réutilisation des informations qu’elle contient.
L’adhésion à la charte est purement volontaire. Elle s’appuie sur la création d’une relation de confiance entre des acteurs soucieux de l’intérêt du public de bénéficier d’outil de jurimétrie respectueux des principes fondamentaux détaillés dans le rapport téléchargeable en bas de page.