25 octobre 2024

Le Tribunal de l'UE valide l'interdiction de fournir des services de conseil juridique au gouvernement russe et à des personnes morales établies en Russie

LBC-FT

Par trois décisions rendues le 2 octobre 2024 (aff. T-797/22 ; T-98/22 ; T-88/22), le Tribunal de l'Union confirme que l'interdiction de fournir des services de conseil juridique au gouvernement russe et aux entités établies en Russie ne méconnaît pas la Charte des droits fondamentaux de l'UE, ni ne porte atteinte à l'indépendance de l'avocat.

Le Tribunal de l'Union a été saisi de plusieurs recours en annulation contre les dispositions du 8e paquet de sanctions prises contre la Russie interdisant la fourniture directe ou indirecte de conseils juridiques, y compris en matière fisale, au gouvernement russe ou à des personnes morales, entités ou organismes établis en Russie (article 5 quindecies § 1 et 2, règlement 833/2014, mod. règl. 2022/1904 et décision PESC 2022/1909).

Le Tribunal rejette l'ensemble des arguments des requérants qui invoquaient la violation des articles 4, 47 § 2 et 52 alinéa 1 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 6, paragraphe 1, de la CEDH. 

Tout en rappelant que l'article 47 de la Charte consacre le droit fondamental d'accéder à un avocat et de bénéficier de ses conseils s'il existe un lien avec une procédure juridictionnelle, qu'elle soit déjà ouverte ou qu'elle puisse être anticipée à l'occasion de l'évaluation par l'avocat de la situation juridique de son client, le Tribunal ne voit, en l'espèce, aucune atteinte portée à ce droit, puisque le règlement 833/2014 autorise la fourniture de services de conseils juridiques strictement nécessaires à l'exercice d'une mission de défense ou de représentation en justice ou pour l'obtention de conseils sur la manière d'engager ou d'éviter une procédure juridictionnelle, administrative ou arbitrale.

En revanche, l'interdiction litigieuse s'applique, notamment lorsque, en matière gracieuse, un avocat assiste un client ou agit au nom et pour le compte de celui-ci dans la préparation ou la réalisation de certaines transactions essentiellement d'ordre financier et commercial dans un contexte dépourvu de lien avec une telle procédure juridictionnelle. 

Ensuite, le Tribunal écarte tout grief tiré de la violation du secret professionnel entre les avocats et leurs clients. Ces restrictions, qui comme le souligne le Tribunal, sont circonscrites (les personnes physiques n'étant pas concernées) et assorties de dispositions d'exception, sont justifiées et proportionnées au regard des objectifs poursuivis par ces mesures, à savoir la protection de l'intégrité territoriale, de la souveraineté et de l'indépendance de l'Ukraine en contribuant à limiter les ressources économiques et financières du régime russe. 

Enfin, le Tribunal exclut toute atteinte à l'indépendance de l'avocat, notamment au regard des objectifs poursuivis par ces restrictions. Il retient aussi que les dispositions du code de déontologie des avocats européens, rédigé par le Conseil des barreaux européens, qui ne constitue des règles de droit de l'Union, ne sont pas de nature à justifier que l'indépendance de l'avocat puisse garantir aux avocats une totale liberté dans le choix dans leur mandat en dehors d'une procédure juridictionnelle.