L’Assemblée générale du CNB a examiné le rapport de la commission des textes qui présente les dernières propositions de la DACS tendant à encadrer plus strictement la structuration des écritures dans le cadre des procédures écrites avec représentation obligatoire en première instance et en appel. Dans sa résolution, le CNB dénonce une atteinte grave à l’indépendance de la profession d’avocat et une nouvelle entrave à l’accès au juge que constitue notamment l’introduction d’un encadrement méthodologique impératif de la formulation des moyens, dénué d’intérêt eu égard au cadre réglementaire actuel, qui assure un encadrement suffisant des écritures des avocats.
Sur un rapport de la commission des textes, le CNB a examiné les dernières propositions de la Direction des Affaires Civiles et du Sceau (DACS) de modification du code de procédure civile tendant à encadrer plus strictement la structuration des écritures dans le cadre des procédures écrites avec représentation obligatoire devant le Tribunal judiciaire et la Cour d’appel.
Ces propositions consistent à :
1) « imposer » dans les écritures la rédaction d’une synthèse des moyens à la fin de la discussion et avant le dispositif,
2) « préciser » que cette synthèse ne pourra excéder 10 % des écritures dans la limite de 1.000 mots,
3) « préciser » que les moyens doivent être récapitulés dans l’ordre des prétentions et sous la forme d’une liste numérotée comprenant des pièces afférentes,
4) prévoir que le tribunal n’examine que les moyens développés dans la discussion et mentionnés dans la synthèse, et qu’il « ne sera valablement saisi que des moyens développés dans la discussion et récapitulés dans la synthèse »,
5) créer un dossier unique de pièces dans l’ordre judiciaire, dans les procédures écrites devant le tribunal judiciaire, sur la base de l’exemple de l’inventaire détaillé des pièces jointes à la requête devant les juridictions administratives,
6) créer un bordereau unique en première instance et devant la cour d’appel,
Dans sa résolution, le CNB dénonce une atteinte grave à l’indépendance de la profession d’avocat et une nouvelle entrave à l’accès au juge que constitue l’introduction d’un encadrement méthodologique impératif de la formulation des moyens de droit et de fait, dénué d’intérêt au regard du cadre réglementaire actuel, qui assure un encadrement suffisant des écritures des avocats en posant des principes clairs et adaptables à tous les dossiers (art. 768, 954 et 446-2 du CPC).
Ces propositions, inspirées en grande partie des conclusions du rapport remis au Garde des Sceaux en avril 2021 par le groupe de travail chargé de proposer des mesures visant à la résorption des stocks, consistent en réalité en l’introduction d’une rationalisation administrative dans la gestion des écritures des avocats pour permettre au juge judiciaire de rendre davantage de décisions à moyens matériels et humains constants.
Le CNB s’oppose fermement à toute accroissement abusif des contraintes méthodologiques assimilées à des règles processuelles assorties de sanctions irréversibles, qui génèrent une augmentation des incidents de procédure, des recours, ainsi qu’un allongement des procès dans le but illusoire de compenser l’absence chronique des moyens dévolus à l’institution judiciaire. Les règles procédurales ne sont pas destinées à la gestion des flux mais à favoriser des décisions judiciaires de qualité.
De façon pragmatique, ce projet, qui porte une atteinte directe au droit à un procès équitable, entrainera nécessairement une exposition plus importante des avocats aux risques liés à leur responsabilité civile professionnelle, en leur faisait supporter d’éventuelles défaillances quant à la rédaction d’une synthèse excessivement encadrée.
Concernant le dossier unique de pièces numérisé, ce dispositif suppose la mise en œuvre d’importants moyens techniques qui, comme le rappelle la DACS dans sa note, n’existent pas à ce jour. Les magistrats n’ont pas pour le moment accès au dossier du tribunal.
Enfin, s’agissant de la création d’un bordereau unique de pièces en première instance et en appel, un tel dispositif ne correspond pas à la structure de la première instance judiciaire et alourdirait inutilement les dossiers d’appel.