Dans un contexte juridique et sociétal marqué par des préoccupations de plus en plus sécuritaires, le Conseil national des barreaux a exprimé, lors de l'assemblée générale du 2 février 2024, ses inquiétudes vis-à-vis de le proposition de loi instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste.
Lors de l'assemblée générale du du 2 février 2024, la commission Libertés et droits de l'Homme du CNB a présenté une résolution dénonçant la proposition de loi instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste.
Cette proposition de loi, déposée devant le Sénat le 12 décembre 2023, vise à renforcer le suivi post-carcéral des individus condamnés pour des faits de terrorisme, le suivi et les moyens de répression des mineurs radicalisés et à compléter l'arsenal administratif et pénal de lutte anti-terroriste.
Le CNB dénonce plusieurs dispositions de cette proposition de loi qu'il estime contribuer à l'essor du droit pénal de la dangerosité, c'est-à-dire la tendance à restreindre les droits et libertés des individus pour des actes futurs et incertains qu'ils seraient susceptibles de commettre au nom de préoccupations sécuritaires. Plus spécifiquement, plusieurs dispositions de la proposition de loi suscitent l'inquiétude du CNB.
L'article 1er abaisse ainsi les seuils permettant de prononcer des mesures judiciaires de prévention de la récidive terroriste, tandis que l'article 2 élargit les possibilités de rétention de sûreté. L'article 3 vise à durcir les mesures de sûreté en instruction contre les mineurs impliqués dans des faits terroristes, ce qui soulève des préoccupations quant à l'équilibre entre répression et réinsertion.
D'autres articles de la proposition de loi, tel que l'article 7, introduisent de nouvelles mesures restrictives de liberté, comme l'interdiction administrative de paraitre lors d'événements majeurs, laquelle ne fait l'objet d'aucun contrôle juridictionnel préalable.
En outre, la reprise d'articles précédemment censurés dans le domaine de l'immigration et leur inclusion dans une loi antiterroriste sont dénoncées comme nourrissant un amalgame dangereux entre étrangers et terroristes.
Enfin, des dispositions telles que l'article 11, qui punit la simple détention d'images liées au terrorisme sans preuve d'intention criminelle, ainsi que l'article 14, qui prévoit des peines complémentaires automatiques, sont également critiquées pour leurs potentielles conséquences sur les libertés individuelles et le respect des droits fondamentaux.
Le CNB insiste sur les dangers d'un tel durcissement du système pénal, qu'il estime contraire aux principes essentiels de l'État de droit, notamment le droit à la sûreté et à la présomption d'innocence. Il appelle ainsi le législateur à la plus grande vigilance et au respect des droits et libertés constitutionnellement conventionnellement garantis.