Ce rapport s’inscrit dans un mouvement de pénalisation de la maladie mentale commencé avec l’adoption du nouveau code pénal en 1994 et la création de l’article 122-1 du Code pénal lequel a remplacé les dispositions du célèbre article 64 excluant les déments du domaine de la sanction pénale, poursuivi avec l’adoption de la loi du 25 février 2008 laquelle a introduit les mesures de sureté qui peuvent désormais assortir l’hospitalisation sous contrainte prononcée par les juridictions. Cette loi avait été adoptée à la suite de deux affaires dramatiques : la récidive de Francis Evrard et le non-lieu prononcé à l’égard de Romain DUPUY.
En l’état actuel du droit, le premier alinéa de l’article 122-1 du code pénal dispose que « N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. »
Cette irresponsabilité pénale de la personne dépourvue de son libre arbitre répond à une exigence juridique, constitutionnelle et conventionnelle et il n’est nullement question de remettre en cause ce principe.
Dans son rapport remis en février 2021 au Garde des Sceaux, la commission RAIMBOURG-HOUILLON a clairement recommandé de ne surtout pas toucher aux dispositions de l’article 122-1 et considère qu’au regard de la très forte imbrication entre troubles psychiques avérés et recours à des substances psychoactives, l’exclusion du bénéfice de l’article 122-1 pour les actes commis à la suite de consommations de toxiques serait une disposition dont la radicalité aggraverait le risque de pénaliser la maladie mentale et constituerait une atteinte substantielle aux principes fondamentaux du droit pénal relatif à l’élément intentionnel.
La commission LDH note que le monde carcéral comptant de nombreux malades mentaux qui y subissent souvent violences et manque de soins tandis que l’hôpital psychiatrique fonctionne dans une situation de pénurie de plus en plus alarmante, il est légitime de se demander si les projets de réforme actuelle ne vont pas aggraver une regrettable logique de confusion, sur fond de pénurie de moyens, entre maladie mentale, dangerosité et délinquance.
Au lieu d’une réforme de l’article 122-1 du code pénal, la commission LDH averti que l’expertise psychiatrique a surtout besoin de moyens : les experts psychiatres sont insuffisamment nombreux et très mal rémunérés. Ils sont par ailleurs en demande de formation, de conférences de consensus et d’échanges interdisciplinaires pour maintenir un niveau élevé d’expertise au regard de la technicité des missions dont ils sont investis.
Ainsi, la commission LDH propose, plutôt que de déséquilibrer l’édifice pénal et de réformer dans l’urgence l’article 122-1, d’améliorer l’existant et de s’en tenir aux préconisations du rapport RAIMBOURG-HOUILLON dont la mission était justement d’éviter la précipitation à laquelle mènent les initiatives actuelles moins d’un mois après l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation.