Il y a un an, le Conseil national des barreaux initiait un recours contre l’application “GendNotes” : une application mobile de prise de notes, permettant aux militaires de la gendarmerie nationale de dématérialiser leur prise de notes et d’en faciliter la transmission, par voie électronique, aux autorités judiciaires et administratives compétentes.
Le CNB dénonçait alors, dans une résolution adoptée le 20 mars 2020, les risques de dérive et de détournement des données collectées et le risque de fichage de la population qu’engendrerait une telle application.
En effet, le décret N° 2020-151 du 20 février 2020 portant autorisation d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé "GendNotes", prévoit notamment l’autorisation de collecter et de conserver des données ethniques, religieuses ou politiques si elles sont "strictement nécessaires".
Le décret prévoit notamment l’autorisation de collecter, de conserver, d’analyser et de transférer :
- L’ensemble des éléments relatifs aux personnes, aux lieux ou aux objets qui sont recueillis dans le cadre des interventions des militaires de la gendarmerie nationale ou de l’exécution de leur service, y compris la photographie des personnes prise au moyen de l’application ;
- L’ensemble des éléments de procédure transmis aux magistrats lors de garde à vue ou lors du traitement de certaines infractions relatives à la police de la route ;
- Les éléments relatifs à l’origine raciale ou ethnique, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, l’appartenance syndicale, la santé ou la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle, constituant des données sensibles au sens de la règlementation informatique et libertés
Le CNB obtient l'intervention du Conseil d'État
Des suites du recours initié par le CNB, ce mardi 13 avril, le Conseil d'État a partiellement remis en cause le fichier controversé de la gendarmerie "GendNotes". Si l’institution dénonce les risques de dérive et de détournement des données collectées par cette application, elle a néanmoins refusé d'annuler le décret autorisant sa création.
La décision du Conseil d'Etat a permis d’annuler l’article du décret du 20 février 2020 prévoyant que les données puissent être exploitées « dans d'autres traitements, notamment par le biais d'un système de pré-renseignement ». L'article contesté ne précisait pas l'identité et la nature de ces autres fichiers vers lesquels pourraient être transférées les données récoltées via "GendNotes".
Par ailleurs, il convient de nuancer cette victoire, puisque le Conseil d'État a refusé d'annuler la partie du décret qui permet la collecte des données sensibles, touchant notamment aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou encore à l'orientation sexuelle et à l'origine raciale.
Conscient des risques inhérents à la mise en œuvre de la collecte de telles données, le juge administratif a toutefois souhaité instaurer des garde-fous. Ainsi, il a rappelé que ces données ne pouvaient être collectées qu'en cas de "nécessité absolue" et a répété qu'il était interdit de procéder à des recherches de personnes à partir de données touchant à l'orientation sexuelle ou aux opinions politiques.
Le CNB reste pleinement mobilisé pour la protection des droits et libertés fondamentales des personnes.