Le Conseil national des barreaux, réuni en assemblée générale le 3 février 2017, a adopté une résolution proposant au ministère de la Justice les modalités d’encadrement de la période de collaboration qualifiante. Cette période d’une année, votée par l’Assemblée générale du 11 octobre 2014 après une concertation très favorable des barreaux, serait effectuée en qualité d’avocat référendaire à l’issue d’une année de formation en qualité d’élève avocat.
Une réforme globale concertée
Cette proposition s’inscrit dans le cadre d’une réforme globale de l’accès à la profession d’avocat initiée depuis plusieurs années et portant à la fois sur les conditions d’entrée dans les écoles d’avocats, sur la définition des principes d’organisation de la formation et l’harmonisation des programmes et sur l’examen du certificat d’aptitude à la profession d’avocat (CAPA).
La commission de la formation professionnelle a élaboré chacune de ces propositions en tenant compte des retours de la concertation des instances de la profession. Les écoles d’avocats (EDA), mais aussi les Ordres et les syndicats, ont pu faire valoir leurs points de vue. L’assemblée générale du Conseil national des barreaux a ensuite voté en faveur de ces propositions à une grande majorité des suffrages exprimés, et parfois même à l’unanimité.
La formation initiale telle que proposée par le CNB
La formation initiale comporte, depuis 2005, trois périodes continues de 6 mois dont l’ordre est fixé par l’école : l’enseignement, le projet pédagogique individuel (PPI) et le stage de l’élève auprès d’un avocat.
Un sondage réalisé auprès des élèves par la Fédération nationale des élèves avocats a permis de distinguer la nécessité d’une réforme permettant à des élèves ayant une moyenne d’âge plus élevée qu’auparavant (de 26 à 27 ans) d’accéder plus rapidement à la profession. L’exigence d’une formation à l’école plus courte est à présent communément admise.
Le caractère professionnel de la formation doit également être renforcé. Il est en effet inutile d’imposer aux élèves des enseignements qu’ils ont déjà reçus à l’université sur les matières fondamentales. En revanche, il convient de mettre l’accent sur des aspects pratiques pour les préparer au métier d’avocat.
Le Conseil national des barreaux propose ainsi que la formation initiale comporte :
12 mois en qualité d’élève avocat comportant :
- Une période d’enseignements à l’école sur 4 mois, exclusivement consacrés à la pratique professionnelle, selon un programme conforme aux dispositions déjà arrêtées par le CNB (voir notre article : « Formation initiale : adoption et publication d’une décision à caractère normatif harmonisant les programmes »).
- Un stage en cabinet d’avocats de 6 mois (en France ou, comme cela est déjà consacré, en partie dans un autre État membre de l’Union européenne) ;
- 2 mois consacrés à des stages de découverte optionnels et aux révisions ;
L’élève qui le souhaite pourrait effectuer une période de formation supplémentaire de six à douze mois, consacrée à un PPI (stages à l’étranger, en juridiction, en entreprise, etc.).
À l’issue de cette période de 12 mois, l’élève avocat passerait les épreuves du CAPAR (certificat d’aptitude à la profession d’avocat référendaire). Cet examen serait allégé et une plus large place serait conférée au contrôle des connaissances en déontologie et au contrôle continu.
Après l’obtention du CAPAR, son titulaire pourrait prêter serment.
12 mois en qualité d’avocat référendaire inscrit au tableau
L’élève serait ainsi en situation d’exercer la profession au terme de 12 mois. Ce n’est en effet qu’après la prestation de serment qu’il peut véritablement compléter sa formation en exerçant toutes les fonctions d’un avocat.
Conformément au large consensus des barreaux, l’avocat référendaire aurait l’obligation pendant 12 mois d’exercer la profession d’avocat comme collaborateur, libéral ou salarié, selon les modalités qui seront à prévoir par le CNB.
Des aides à la recherche d’une collaboration seront apportées. L’élève qui n’aurait pas immédiatement une collaboration après l’obtention du CAPAR pourrait réaliser une période consacrée à un PPI dans l’attente de cette collaboration.
Cela étant, l’avocat référendaire devrait être, selon la commission de la formation professionnelle du CNB, un avocat de plein exercice, qui devrait être rémunéré comme tel. Il n’aurait pas l’obligation de faire état de la mention « référendaire ».
L’avocat référendaire, inscrit sur une liste spéciale du tableau de l’Ordre, aurait également l’obligation de suivre en alternance un programme de formation initiale complémentaire d’une durée de 30 heures. Ce programme serait mis en œuvre par l’EDA selon les principes et l’harmonisation arrêtée par le Conseil national des barreaux dans sa décision à caractère normatif.
Ces séances de formation pour les avocats référendaires pourraient se tenir tout au long de l’année. La commission de la formation professionnelle considère par exemple que les écoles pourraient organiser ces séances de façon régulière, un vendredi par mois, selon un calendrier communiqué en début d’année.
Enfin, l’avocat référendaire disposerait d’un « avocat référent » chargé de suivre sa formation, de la parfaire d’une manière pratique et de l’aider dans son parcours en lui assurant notamment un soutien déontologique et pratique.
À l’issue de cette seconde période de 12 mois, l’EDA délivrerait le CAPA au candidat ayant satisfait au parcours de formation sous le contrôle du référent et du bâtonnier. Il serait alors libre de continuer sa carrière professionnelle en collaboration ou de s’installer seul ou en qualité d’associé.
Des propositions en réponse à un besoin de sécurité juridique
La finalité du dispositif envisagé est évidemment la consolidation des compétences du futur avocat.
Mais au-delà, la période de « collaboration en alternance » d’une année répond à l’objectif fondamental de donner à l’avocat les meilleurs atouts de son indépendance, qu’il s’agisse de son indépendance intellectuelle ou de son indépendance économique.
Elle aurait également le mérite d’éviter les installations vouées à l’échec, de la part de jeunes avocats qui n’ont pas nécessairement l’expérience suffisante permettant de s’installer valablement et durablement.
Elle répond ainsi à un véritable besoin de sécurité juridique, de qualité des prestations, d’accès sécurisé à la justice, de protection renforcée des droits de la défense. Son ambition est de protéger les individus dans leurs droits, droits précisément défendus par l’avocat.
C’est en ce sens qu’une collaboration supervisée et qualifiante lors de la première année d’exercice professionnel de l’avocat trouve toute sa légitimité.
Elle est d’autant plus indispensable dans le contexte actuel d’évolution de la profession d’avocat. Il est aisé de démontrer la complexification croissante du droit, la nécessité de former des avocats hautement qualifiés sur le fond mais aussi dans leur pratique de la profession. Le recours à un accompagnement obligatoire garantit ainsi une mise en situation sécurisée et sécurisante de l’avocat lui-même, mais aussi des clients qui, pour les concernant, voient le traitement de leur situation garantie.
L’ensemble de ces propositions a été transmis à la Chancellerie, en vue de procéder aux modifications nécessaires des textes législatifs et réglementaires en vigueur. Le Conseil national des barreaux souhaite que cette réforme ait lieu dans les meilleurs délais.