Chères Consœurs, Chers Confrères,
Depuis l’assemblée générale du CNB du 7 février, qui a reconduit à l’unanimité le mouvement des avocats contre la réforme des retraites, tous les barreaux de France ont renouvelé leur engagement selon des modalités qui leur sont propres.
Nous connaissons, en tant qu’élus, en tant qu’avocats, les sacrifices que cette mobilisation implique. Chacun d’entre vous doit en être remercié.
Ces derniers jours, des représentants du CNB, de la Conférence des bâtonniers, du barreau de Paris et de la CNBF ont rencontré à deux nouvelles reprises le Gouvernement pour des réunions techniques. Ces réunions se sont conclues par un nouvel échec puisque le Gouvernement persiste à vouloir nous faire entrer dans le système universel et à faire supporter aux avocats les conséquences financières de cette intégration forcée.
En réalité, depuis le 23 octobre dernier, le Gouvernement n’a formulé aucune nouvelle proposition et souhaite toujours que les avocats compensent sur leurs propres deniers la hausse des cotisations retraites :
- soit en utilisant les réserves de la CNBF, fruit de l’épargne de toute la profession, et destinées à garantir le paiement des pensions ;
- soit en imposant une sur-cotisation aux avocats déclarant plus de 80 000 euros de revenus par an, c’est dire une discrimination insupportable au préjudice des seuls avocats.
Cette alternative est inacceptable et démontre que le Gouvernement ne comprend pas les avocats et les raisons qui dictent leur revendication d’un régime autonome.
Ce futur système de retraite n’a plus rien d’universel alors que chaque jour des concessions sont faites à d’autres professions. Mais les professions libérales et les avocats ne se voient eux que proposer, l’anéantissement économique des cabinets les plus fragiles.
Face à ce blocage du Gouvernement, nous multiplions les dépôts d’amendements (671 amendements concernant les avocats ont été déposés) et les rencontres de parlementaires. Nous avons ainsi été auditionnés pendant plus de deux heures par le rapporteur général de la loi.
Nous travaillons également en détail les arguments juridiques dans le cadre d’un futur recours devant le Conseil constitutionnel qui pourra être fait à l’issue de la discussion parlementaire contrainte, alors que des voix commencent à poindre sur le 49-3 pour signifier clairement le passage en force auquel nous sommes confrontés.
Par ailleurs, nous ne cessons de déployer des actions communes avec le collectif « SOS Retraites ».
Face à notre détermination, et au lieu de répondre par des mesures politiques fortes aux inquiétudes des avocats, la Chancellerie préfère communiquer en tentant de diviser les professions judiciaires et d’opposer avocats, magistrats et personnels de justice, en nous imputant la responsabilité des dysfonctionnements dans les juridictions.
Notre grève a simplement révélé aux Français ce que tous les professionnels du droit savent depuis longtemps : privée de moyens, malmenée par des réformes successives sans autre ambition qu’une vision tristement budgétaire mais sans budget suffisant, la justice française est à bout de souffle.
Si le Gouvernement n’est pas capable de prendre la mesure de la situation et de se saisir du sujet, il appartient aux professionnels de la Justice de s’en emparer pleinement et de proposer un plan d’urgence conçu par les acteurs de la justice, dans l’intérêt des justiciables.
Les syndicats de magistrats, des greffiers, des fonctionnaires de justice, le CNB ainsi que les représentants de la profession se sont donc rapprochés pour construire une réponse politique commune à la hauteur de l’enjeu. Nous reviendrons rapidement vers vous pour vous présenter les modalités de cette initiative commune.
Nos engagements professionnels et notre solidarité commandent de nous unir avec les magistrats et les personnels de justice lorsqu’il s’agit de défendre l’institution judiciaire et la Justice : nous le devons aux justiciables et, plus largement, aux citoyens.
Les tentatives de division renforcent notre détermination.
Nous devons être reçus la semaine prochaine par la Garde des Sceaux pour évoquer les autres sujets qui préoccupent depuis trop longtemps la profession et qui n'ont jamais donné lieu à des réponses à la hauteur de nos demandes : aide juridictionnelle, force exécutoire de l'acte d'avocat, TVA pour les particuliers...
Notre mouvement est populaire, relayé, soutenu parce que nous nous battons dans l’intérêt de tous.
Continuons !
Christiane Féral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux ; Hélène Fontaine, vice-présidente de droit, présidente de la Conférence des bâtonniers ; Nathalie Roret pour le bâtonnier de Paris, vice-président de droit ; Catherine Jonathan-Duplaa, vice-présidente ; Jean-Luc Forget, vice-président ; Christian Leroy, trésorier ; Élodie Mulon, secrétaire du bureau ; Régine Barthélémy, Matthieu Dulucq, Catherine Gazzeri, Christophe Thévenet, membres du bureau.