30 août 2024

Sociétés d'avocats : ce qui change au 1er septembre 2024

Statut professionnel de l'avocat

L’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 relative à l'exercice en société des professions libérales réglementées et son décret d’application n° 2024-872 du 14 août 2024 à la profession d’avocat entrent en application le 1er septembre 2024.

Sont concernés par le décret toutes les dispositions relatives aux sociétés d’avocats (SCP, SEL, SPFPL mono-professionnelles). Les dispositions relatives aux sociétés pluri-professionnelles (SPE, SEP, SPFPL) seront l’objet d’un autre décret d’application non encore paru.

Sont abrogés par ces textes :

  • la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales ;
  • le décret n° 92-680 du 20 juillet 1992 pris pour l'application à la profession d’avocat de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les SCP
  • le décret n° 93-492 du 25 mars 1993 pris pour l'application à la profession d'avocat de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 sur les SEL et les SPFPL.

Entrée en vigueur 

L’ordonnance et le décret entrent en vigueur le 1er septembre 2024 avec un délai de mise en conformité d’un an. Les sociétés d’avocats (SEL, SPFPL, sociétés commerciales de droit commun d’avocat) devront donc être en conformité avec les dispositions de l’ordonnance et du décret au 1er septembre 2025.

Les dispositions relatives à l’information des Ordres pesant sur les SEL et les SPFPL (ens. art. 151, 111 et 136 du décret) entrent en vigueur le 1er septembre 2024 (sans délai de mise en conformité).

Des évolutions à plusieurs niveaux

L’ordonnance et le décret du 14 août 2024 opèrent une réforme à droit constant des modalités d'exercice de la profession d'avocat en société mono-professionnelle.

Cette réforme concerne:

  • les sociétés civiles professionnelles (SCP)
  • les société en participation (SEP)
  • les sociétés d’exercice libéral (SEL)
  • les sociétés de participation financières de profession libérale (SPFPL) mono-professionnelles c’est-à-dire lorsqu’elles détiennent des participations dans des sociétés d’exercice d’avocats

Pour les sociétés civiles professionnelles (SCP)

  • l’ordonnance n’apporte pas de changement notable à la SCP
  • Le décret apporte quelques nouveautés à signaler :
    • règle de majorité (art. 20) : 
      • des 2/3 pour la modification des statuts d’une SCP (contre 3/4 antérieurement) (art. 20)
      • des 2/3 pour transformation des SCP en une autre forme ou en SPE (art. 20)
    • la réunion des parts sociales en une seule main entraîne la dissolution de la SCP si cette situation n’a pas été régularisée dans le délai de deux ans prévu à l’article 29 de l’ordonnance (tant que la SCP n’est pas dissoute, elle peut faire partie d’une opération de fusion) (art. 82)

Pour les sociétés en PARTICIPATION (SEP)

  • l’ordonnance consacre la société en participation de profession libérale (art. 34 et s.) et le décret du 14 août dernier précise les règles applicables aux sociétés en participation d’avocats (art. 83 et s.).
  • Il est à noter que :
    • la SEP peut être composée de personnes physiques ou morales (la SEP interprofessionnelle consacrée par l’ordonnance fera l’objet d’un autre décret)
    • il n’existe pas la possibilité d’évincer la solidarité des associés en matière de RCP comme dans l’AARPI 

Pour les sociétés D’EXERCICE LIBéRAL (SEL)

  • l’ordonnance clarifie les règles de détention du capital et de la gouvernance des SEL (art. 40, 46 et s., art. 58 et s. et art. 80 et s.)
  • l’ordonnance consacre la possibilité de prévoir dans le statut de SEL une clause de retrait capitalistique (art. 57)
  • l’ordonnance prévoit un droit annuel d’information des Ordres (art. 44) dont les modalités d’application à la profession d’avocat sont organisées par le décret du 14 août dernier (art. 111) :
    • avant le 1er mars de chaque année , une SEL doit transmettre au Conseil de l’Ordre dont relève la société les documents mentionnés à l’article 44 de l’ordonnance si et seulement si ces documents ont fait l’objet d’un changement au cours de l’année qui précède.
    • ces documents sont :
      • un état de la composition de son capital social et des droits de vote afférents ainsi qu’une version à jour de ses statuts
      • les conventions contenant des clauses portant sur l’organisation et les pouvoirs des organes de direction, d’administration ou de surveillance : sont visés les pactes, règlements intérieurs ou autre convention portant sur la gouvernance de la structure
  • il est également à noter que le décret maintient comme condition d’inscription au tableau qu’au moins un associé de la SEL soit inscrit au barreau du siège (art. 89)

Pour les SOCIéTéS DE PARTICIPATIONS FINANCIERES DE PROFESSIONS LIBERALES D’AVOCATS (SPFPL)

  • élargissement du périmètre des professions concernées par le régime des SPFPL aux géomètres experts (art. 110 de l’ordonnance)
  • clarification par l’ordonnance des règles de détention et de gouvernance
  • possibilité pour les SPFPL de détenir des droits et des biens immobiliers (art. 110 de l’ordonnance)
  • possibilité de détenir des parts ou actions de sociétés commerciales dédiées exerçant une activité commerciale dérogatoire (art. 110 et de l’ordonnance et art. 131 du décret)
  • à l’image des SEL, obligation d'adresser chaque année à l'Ordre professionnel concerné un état de la composition du capital, des droits de vote, les statuts à jour, ainsi que les pactes lorsque les clauses relatives à l'organisation et aux pouvoirs des organes de direction, d'administration ou de surveillance ont été modifiées (art. 113 de l’ordonnance et art. 136 du décret)
  • mise en place d’un délai de régularisation d’un an dans l’hypothèse où l’objet de la SPFPL viendrait à ne plus être rempli, faute de participation dans des structures d’exercice de PLR, sous peine de dissolution (art. 110, al. 3 de l’ordonnance et art. 135 du décret).

Pour les SOCIéTé D’EXERCICE DE DROIT COMMUN (SEDC)

L’ordonnance ne met pas fin aux SEDC mais prévoit désormais qu’elles sont soumises au régime des SEL, sauf sur un point, la dénomination sociale (art. 132).

Tout comme les SEL, les SEDC devront respecter les règles applicables au SEL et disposeront d’un délai d’un an, jusqu’au 1er septembre 2025, pour, s’il y a lieu, mettre en conformité leur statut.

UNE OUVERTURE DES MODALITÉS DE TRANSMISSION DES ACTES D’UNE SOCIÉTÉ

Il est également à noter que :

  • le décret ouvre les modalités de transmission des actes relatifs à la vie d’une société en prévoyant qu’ils peuvent être transmis par tout moyen (papier ou électronique) qui confère date certaine à sa réception
  • sont visés :
    • les actes transmis entre la société ou l’un de ses associés avec les Ordres (demandes d’inscription, invitation du bâtonnier à régulariser une situation, etc.)
    • la notification entre associés d’une même société (ex. notification du projet de cession, demande de retrait dans une SCP, etc.)

Le commission Statut professionnel de l’avocat du CNB travaille actuellement à la rédaction d’un guide dans le but de présenter les apports de la réforme pour chaque sociétés d’avocats. Ce guide est destiné aux avocats mais également aux Ordres.