Par jugement en date du 15 juin 2017, le tribunal administratif de Rennes annule le contrat conclu entre une commune et une société de conseil ayant pour objet l’assistance à maîtrise d’ouvrage en vue de la réalisation d’une zone d’aménagement concertée (ZAC), en considérant que les prestations prévues par le contrat portent pour l’essentiel sur une activité de consultation juridique.
Dans cette affaire, le Conseil national des barreaux et l’Ordre des avocats de Rennes étaient intervenus volontairement au soutien du recours formé par un cabinet d’avocats dont l’offre, classée deuxième, avait été écartée par la commune au profit de celle d’une société de conseil ne détenant pas la qualité d’avocat.
Pour contester cette attribution, il était soutenu que les prestations prévues par ce contrat relevaient pour l’essentiel d’une mission de consultation juridique à titre principal visant à sécuriser la collectivité dans les différentes étapes de la procédure de publicité et de mise en concurrence pour le choix d’un aménageur, et que la société
contractante n’était pas habilitée à délivrer en vertu de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée.
Le cahier des charges imposait à l’attributaire notamment, d’« apporter à la collectivité sur le plan juridique un soutien affirmé, et [de] garantir notamment par ses conseils et les pièces produites une fiabilité juridique sans faille de la procédure », ce qui impliquait la rédaction de recommandations personnalisées au regard de la réglementation en vigueur et l’élaboration des actes et documents juridiques nécessaires à la passation d’un tel marché (cahier des charges, règlement, documents de publicité, projet de délibération municipale, etc.).
Il était aussi souligné que les juristes salariés de cette société n’étaient pas autorisés à fournir les prestations juridiques imposées par ce marché, le pouvoir adjudicataire ne pouvant être considéré comme leur employeur au sens de l’article 58 de la loi 31 décembre 1971 encadrant l’activité juridique des juristes d’entreprise.
Recevant l’intervention du Conseil national des barreaux et de l’Ordre des avocats, le tribunal administratif de Rennes annule le marché litigieux comme étant conclu en méconnaissance des dispositions du Titre II de la loi du 31 décembre 1971 et du 4°) du II de l’article 30 du code des marchés publics alors applicable à la cause.
Dans son jugement, le tribunal considère, aux termes d’une analyse approfondie du cahier des charges, que « le marché litigieux, s’il portait pour partie sur l’évaluation des risques financiers, comprenait une part de conseil juridique personnalisé prépondérante pour sécuriser la procédure de passation du marché » et que cette mission [relevant]
pour l’essentiel d’une activité de consultation juridique personnalisée ne pouvait être attribuée à la société de conseil eu égard à son activité ».
Cette société était seulement autorisée à exercer des activités juridiques accessoires à son activité principale de conseil en gestion, en organisation ou matière financière dans les conditions prévues par l’article 54 et 60 de la loi du 31 décembre 1971 régissant l’exercice du droit des professionnels non réglementés.
Pour conforter leur analyse, les juges relèvent aussi que la durée d’intervention du juriste désigné par la société de conseil pour assurer l’exécution du marché litigieux était supérieure à celle des autres spécialistes en finance et en urbanisme.
Du fait de la solution rendue, le Tribunal n’a pas eu à se prononcer sur le moyen soulevé par le CNB selon lequel le marché était entaché d’illégalité dès lors que le juriste en charge des prestations ne disposait pas de la qualification exigée par les textes pour exercer à titre accessoire une activité de consultation juridique.
Enfin, le CNB et l’Ordre des avocats de Rennes se voient octroyer la somme de 750 euros au titre de l’article L761-1 du Code de justice administrative.