L’obligation pour les entreprises d’émettre et de recevoir des factures électroniques, qui entre vigueur progressivement à compter du 1er septembre 2026, soulève une difficulté principale en matière de secret professionnel de l’avocat. L’assemblée générale du CNB a pris position.
La loi de finances rectificative pour 2022 soumet les entreprises à l’obligation de facturation électronique dans le double objectif de lutter contre la fraude à la TVA et de simplifier et alléger les obligations administratives des entreprises en préremplissant leur déclaration de TVA.
Deux modes de transmission des factures
- La facturation électronique proprement dite ou « e-invoicing » qui organise la transmission électronique des données de facturation entre opérateurs économiques en y associant l’administration fiscale :
- c’est le mode de transmission principal ;
- la transmission des données s’opère simultanément à la facturation ;
- la communication des données à l’administration fiscale ou « e-reporting », s’effectue a posteriori selon des normes de transmission définies par arrêté gouvernemental :
- c’est le mode de transmission par substitution ;
- la transmission des données s’opère après l’établissement de la facture.
La facturation électronique (e-invoicing) s’appliquera pour toutes les transactions passées entre entreprises assujettis à la TVA en France. En pratique, les entreprises seront tenues d’émettre des factures électroniques mais également d’en recevoir.
Ces entreprises devront également communiquer à l’administration fiscale, selon un procédé dit de e-reporting, les données de transaction, pour des opérations non domestiques ou avec une personne non assujettie (consommateur).
Calendrier
Selon un nouveau calendrier fixé par la loi de finances pour 2024, la facturation électronique entrera en vigueur (tant pour le e-invoicing que pour le e-reporting) :
- Pour les grandes entreprises et les ETI : le 1er septembre 2026, tant pour l’émission que la réception de leur facture ;
- Pour les TPME et les microentreprises :
- le 1er septembre 2026 pour la réception des factures ;
- le 1er septembre 2027 pour leur émission.
Application aux avocats
En tant qu’entreprise, les avocats sont soumis à la facturation électronique au sens large (e-invoicing et e-reporting).
Les travaux commencés sous l’ancienne mandature, se sont poursuivis sous cette mandature, l’application de la facturation électronique aux avocats n’étant pas sans soulever de difficultés en matière de secret professionnel.
En effet, dans le cadre de la transmission des données de facturation (e-invoicing), les avocats, en tant que « personnes dépositaires du secret professionnel », ne seraient pas tenus de transmettre « la dénomination précise du service rendu » (art. 242 nonies J de l’annexe II au CGI) mais resteraient néanmoins tenus de mentionner l’identité et l’adresse de leur client, information couverte par le secret professionnel en application de l’article 2.2 du RIN.
Dans sa résolution, l’assemblée générale exige que les avocats ne soient soumis qu’au seul système du e-reporting sans transmission de l’identité et de l’adresse du client y compris en relation avec des entreprises assujetties à la TVA.
En outre, elle s’inquiète du risque de croisement des données transmises à l’administration fiscale, notamment à des fins de profilage et ciblage de contrôle fiscal ne portant pas strictement sur le respect des obligations en matière de facturation et de TVA et exige des garanties législatives quant à l’absence de croisement des données permettant l’accès à des informations couvertes par le secret professionnel.
En sus, les avocats veilleront à ce que la mise en œuvre du dispositif et les projets de textes au niveau européen (projet de directive ViDA (VAT in the Digital Age)) ne portent pas atteinte au secret professionnel de l’avocat.
Enfin, l’assemblée invite à poursuivre la réflexion sur la pertinence et la faisabilité technique, juridique et financière d’une plateforme souveraine dédiée à la profession et respectueuse des données soumises au secret professionnel d’une part, et sur une labellisation d’opérateurs qui prendraient des engagements spécifiques pour la protection des données transmises d’autre part.