17 novembre 2025

Open data : le CNB défend l’accès intégral des avocats aux données judiciaires

Numérique

S’appuyant sur le rapport du Groupe de travail IA, l’Assemblée générale du Conseil national des barreaux réaffirme l’importance fondamentale, indissociable du droit à un procès équitable, de la publicité des décisions de justice, et s’oppose à l’anonymisation systématique des acteurs judiciaires. Elle met en garde contre les atteintes aux droits de la défense, refuse toute privatisation de la donnée judiciaire et réclame pour les avocats un accès intégral, gratuit et sécurisé aux décisions.

Le groupe de travail sur l’évolution de l’Open data des décisions de justice, mis en place par le Garde des Sceaux et présidé par Daniel Ludet, conseiller honoraire à la Cour de cassation, a remis son rapport au ministre de la Justice le 11 juillet dernier.  

La lettre de mission, en date du 4 février 2025, invitait le groupe de travail à travailler selon trois axes :  

  • L’identification des personnels de justice - la protection des personnes ;  
  • Les atteintes potentielles à la souveraineté et à la sécurité économique - la préservation des intérêts économiques des entreprises mentionnées dans ces décisions ;  
  • La viabilité financière de l’open data - le principe de gratuité totale de la mise à disposition des décisions réutilisées à des fins commerciales dans un contexte budgétaire contraint.    

Le groupe de travail présidé par Daniel Ludet est parti du constat selon lequel, depuis l’adoption des textes régissant l’open data et la mise en œuvre progressive du dispositif de publication en open data des décisions de justice, le contexte technologique, social et informationnel a profondément évolué.

La massification des données publiques, conjuguée à la montée en puissance des infrastructures numériques, a modifié la portée concrète de la publicité des décisions. L’open data tel qu’il se déploie aujourd’hui permet une diffusion instantanée, mondiale, interopérable, sans contrôle d’usage. La standardisation des formats et des métadonnées, qui facilitent l’extraction automatisée d’informations, et le développement de l’intelligence artificielle favorisent une industrialisation de la réutilisation.  

Ces transformations ont accru les tensions initialement identifiées entre les objectifs de transparence et les impératifs de protection des personnes et justifient une réévaluation rigoureuse du cadre juridique, à la lumière des dynamiques contemporaines.  

Le groupe de travail a donc formulé des recommandations pour mieux encadrer la mise en œuvre de l’open data des décisions de justice, en répondant aux trois axes proposés par le Ministre. Il a notamment proposé l'anonymisation systématique des noms des magistrats, des avocats et des personnels de greffe.    

Connaissance prise du rapport présenté par le Groupe de travail IA, l’Assemblée générale du CNB du 14 novembre 2025 :

  • Rappelle que la publicité des décisions de justice constitue un principe démocratique fondamental, indissociable du droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, et que l’open data des décisions de justice constitue une avancée pour la transparence de la justice et l’égalité des armes ;  
  • S’oppose à l’occultation systématique des noms et prénoms des magistrats, des membres du greffe et des avocats et à la décision du Ministre d’étendre le bénéfice de l’anonymisation des noms des magistrats et greffiers à l’ensemble des décisions des juridictions (administratives ou judiciaires) lorsqu’elles sont publiées en open data ;
  • Alerte sur les atteintes graves que l’occultation des dénominations sociales et informations relatives aux entreprises porterait aux droits de la défense, en privant les avocats d’informations indispensables à la stratégie de leurs clients ;
  • S’oppose à toute réforme qui conduirait à restreindre l’accès des avocats aux décisions de justice ou à priver la défense d’informations essentielles ;
  • S’oppose fermement à toute privatisation de la donnée publique judiciaire ;
  • Réitère sa demande d’accès intégral et gratuit aux flux intègres pour les avocats, équivalent à celui dont bénéficient les magistrats via JURICA et JURINET ;
  • Alerte par ailleurs sur le risque d’une fracture numérique et d’un renchérissement des coûts pour les avocats si l’accès des éditeurs aux flux différenciés était conditionné à des licences onéreuses ;
  • Propose la conclusion d’une convention entre le CNB et la Cour de cassation, pour assurer un accès sécurisé, gratuit et universel pour les avocats via e-barreau. 
     

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